Trois années passées depuis le dernier recueil de Patrice Desbiens, c’est une longue attente pour cet auteur fertile qui ne vit que pour la poésie. Il faut dire que ces derniers temps ont été physiquement éprouvants pour le poète. S’il est plus fragile sur ce plan, il n’a rien perdu de sa force poétique. On ne sait si c’est parce qu’il a insisté pour les taper tous à la machine à écrire, mais les poèmes de ce recueil semblent plus ramassés, plus incisifs. Ils portent avec eux cette aura particulière du travail dactylographié. La forme empruntée ici sied parfaitement aux textes proposés par un poète du quotidien qui fait exploser le moment le plus banal pour en révéler toute l’ambiguité poétique.
De sa voix traînante, l’essentiel poète d’origine franco-ontarienne raconte sa méthode : « Je m’assois à la machine, je fouille dans la pile, je trouve des affaires intéressantes et après, je les travaille pour aller chercher le jus. Souvent, je les ai oubliées et c’est comme si je les redécouvrais [il s’exclame comme s’il s’adressait à un animal de compagnie ou à un poupon] : “Ben voyons, toi ! D’où tu sors ?”»
Pourquoi donc s’être astreint à écrire ces textes à la machine et à les présenter, dans poèmes, sous leur forme dactylographiée ? « J’aimais ben le fait que, sans l’écran, t’es plus proche du poème. La différence entre écrire à l’ordinateur et à la machine, c’est comme la différence entre jouer aux échecs en virtuel et jouer avec quelqu’un en vrai, devant toi. Quand t’écris à la machine, c’est comme si t’étais dans le poème. »
L’Oie de Cravan
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